Des membres nous ont demandé de mieux expliquer en quoi consiste le projet COCREA et quelles actions ont été posées par l’APLA par rapport à celui-ci. Ce document vise à faire le point sur les enjeux afin de mieux saisir l’évolution de ce projet.

Mise en contexte

Situé en bordure du lac de l’Achigan, les Camps de Santé Bruchési, un organisme sans but lucratif, a été créé en 1936 comme hôpital afin de lutter contre la tuberculose. Le gouvernement, des organismes sociaux et de nombreuses personnes ont donné des fonds pour l’achat des terrains et la construction de dortoirs et de bâtiments.  Au milieu des années ’60, sa vocation a évolué vers celle d’un camp de vacances pour enfants. Vers la fin des années ’90 le Camp a été fermé, puis réouvert, mis en vente sans succès en 2008 et, opéré par Plein Air Bruchési jusqu’à ce jour. Une subdivision cadastrale a eu lieu en 2014 afin de partager le terrain en trois lots.

De nombreuses tentatives citoyennes ont été faites auprès du gouvernement du Québec et des administrateurs de Camps de Santé Bruchési afin d’assurer la pérennité du camp comme un organisme communautaire géré selon des règles de saine gouvernance, formé par des membres de notre communauté et dirigé par un conseil d’administration représentatif.   Le gouvernement a répété à plusieurs reprises qu’il ne s’ingère pas dans les activités d’une compagnie privée, même s’il s’agit d’un organisme à but non lucratif.  En 2018, un lot et la majorité des bâtiments du Camp ont été vendus au Groupe R3 et les deux autres lots ont été vendus à COCREA Immobilier en 2022. Il s’agit de deux entreprises dirigées par monsieur Eric Desroches. Le projet COCREA est prévu sur les lots acquis en 2022.

Zonage et urbanisme

En 2019, la Municipalité a procédé à une refonte des règlements d’urbanisme applicables à son territoire pour se conformer au schéma d’aménagement élaboré par la MRC Rivière du Nord. Des consultations publiques ont eu pour obtenir les commentaires des citoyens.

En matière de zonage, la première chose à comprendre est qu’un lot se situe dans une zone. On spécifie ensuite les usages permis selon la nature de la zone où il se trouve.  Les usages sont regroupés par classe : résidentiel, récréatif, commercial, industriel, agricole, etc.

Les 3 lots formant le terrain auparavant détenu par Les Camps de santé Bruchési sont situés dans une zone récréative. Celle-ci permet seulement l’usage de camps de vacances.

Les camps de vacances, un patrimoine historique sur notre territoire, font l’objet d’une orientation spécifique en matière d’urbanisme soit: ‘’assurer la pérennité des camps existant et en restreindre la transformation’’. À la suite de l’adoption des orientations, un comité a pris en charge ce dossier et les modifications réglementaires ont été adoptées le 12 novembre 2019.

Aux fins du zonage municipal, une distinction claire est faite entre un camp de vacances et un centre de vacances en termes de définitions et, de classe :

  • ‘’Un camp de vacances est un lieu aménagé généralement en plein nature et qui offre, sous forme communautaire, le séjour et des activités organisées à des enfants, des adultes ou des familles pendant les vacances’’.  Il s’agit d’une activité classée récréative.
  • ‘’Un centre de vacances est un établissement qui offre, moyennant un prix forfaitaire, de l’hébergement, des services de restauration ou d’auto-cuisine et des activités récréatives ou des services d’animation, ainsi que des aménagements et des équipements de loisir.’’ Il s’agit d’une activité classée commerciale.

Nos actions en lien avec le projet COCREA

Le promoteur a annoncé en 2021 un projet du nom de COCREA sur une partie du site du Camp Bruchési. L’APLA a pris connaissance de ce projet et a fait part à la Municipalité qu’elle considérait que le projet était en fait un centre de vacances et en conséquence ne respectait pas le zonage permis sur le site.

En juin dernier, la municipalité a accordé un certificat d’autorisation pour le projet COCREA pour y exercer des activités de camps de vacances. La prochaine étape consiste à faire des demandes de permis et le projet va s’échelonner sur plusieurs années. Nous avons été surpris par l’émission de cette autorisation et nous avons posé des questions au maire à de nombreuses occasions.  Des citoyens ont également posé de nombreuses questions lors des séances du conseil municipal qui ont suivis. Au fil de ces discussions, la Municipalité a réitéré que ce projet respecte la réglementation en matière de zonage.

L’APLA a demandé à la Municipalité à de multiples reprises de lui présenter une opinion juridique quant à la conformité du projet COCREA en regard du règlement de zonage en vigueur.  Comme nous n’avons pas reçu de réponse à notre demande, nous avons alors mandaté une firme d’avocats pour obtenir des informations de la Municipalité en matière de zonage, connaître les autorisations et permis accordés, valider le respect ou non du zonage et nous conseiller dans ce dossier.

Au mois d’août, le promoteur du projet a tenu une séance publique d’information sur le projet.  COCREA Immobilier projette de construire plusieurs nouveaux aménagements d’habitation, service de restauration, amphithéâtre extérieur, spa, centre d’activités nautiques afin d’y tenir des activités récréatives qui visent une clientèle touristique et d’affaires achetant des forfaits.  Il s’agit d’un projet distinct des activités de camp de vacances actuellement tenus sur un des lots du camp.  Des représentants de l’APLA ont assisté à cette présentation et nous sommes toujours d’avis que ce projet est dans les faits un centre de vacances.

Des citoyens ont publié une lettre d’opinion dans l’édition du Journal Le Sentier du mois de septembre 2022.  Ils y ont présenté leurs préoccupations sociales, environnementales et en matière d’urbanisme qui ont fait l’objet d’échanges avec le promoteur lors de la séance d’information. Dans l’article, ceux-ci ont exprimé un besoin d’information relativement aux études d’impact, de connaître le contenu de l’opinion légale de la Municipalité et ils ont déploré une absence de consultation avant l’émission du certificat d’autorisation.   Le maire a ensuite publié une lettre dans le Journal le Sentier en réponse à celle-ci. Le maire indique que les deux définitions (camp de vacances et centres de vacances) existaient dans le règlement d’avril 2019, qu’il y a eu un déplacement du positionnement dans les classes d’usages et que ‘’malgré cette modification règlementaire, les deux termes sont tellement similaires que nous ne pouvons lui soustraire les usages de centre de vacances’’ et donc le projet est conforme à la règlementation selon lui.

Nos avocats ont fait une analyse exhaustive de la règlementation et du projet tel que présenté par le promoteur. Ceux-ci ont déterminé que le projet COCREA est en fait un centre de vacances, de par la nature de ses activités et infrastructures, l’offre sur base de forfaits, la clientèle visée, la nature lucrative et l’assujettissement aux taxes applicables à un commerce. Ce projet constitue une activité commerciale qui n’est pas autorisée selon la réglementation de zonage applicable aux lots sur lesquels le projet est prévu. Ceci confirme les représentations de l’APLA faites auprès de la Municipalité.

Une mise en demeure a été expédiée à la municipalité l’informant de ceci. Il a été demandé de s’assurer de la conformité des activités sur les lots.  Ceci veut dire que le certificat accordé est pour des activités de camp de vacances et que seules ces activités doivent s’y dérouler. Le problème est que les activités du projet COCREA ne se conforment pas.

Nous avons demandé de suspendre l’étude de tout projet ou l’émission de tout nouveau permis en lien avec le projet COCREA, tel qu’il est envisagé ou tout autre projet et, de nous informer de tout développement.

En réponse à la mise en demeure, le procureur de la municipalité souligne que celle-ci a avisé son assureur considérant les allégués de fautes en contravention de la règlementation et, qu’en conséquence, il ne discutera pas des arguments du zonage soulevé dans la mise en demeure. La municipalité nie toute allégation de faute et n’entend aucunement révoquer le certificat de changement d’usage accordé. On y mentionne que la municipalité n’a pas l’intention de modifier son règlement de zonage car le projet présenté est conforme aux usages autorisés dans cette zone.

À cette étape, vous comprendrez que l’APLA, soucieuse de sa mission première, est en total désaccord avec la position de la Municipalité. Malgré nos différences d’opinions, sachez que nous favorisons toujours le dialogue avec la Municipalité afin de régler ce litige dans les meilleurs délais.

Vous avez été nombreux à exprimer votre support aux démarches entreprises en octobre dernier en expédiant un courriel de support et nous vous remercions de votre appui. Nous vous tiendrons informés de l’évolution de cet important dossier pour notre communauté.

Merci de votre attention,

Yvan Gingras,
Président APLA